HISTORIQUE DE LA PAROISSE SAINT-JEAN-BERCHMANS
CE TEXTE EST UNE REPRISE D'UNE BROCHURE ÉCRITE
PAR: MICHÈLE LALANDE,
CÉLINE MARION,
PAUL MASSICOTTE ET
ANDRÉ PETIT
AOÛT 1978
(Jacques Baillargeon et Suzanne Dignard ont fait une addition en 1983).
Converti en format web par Dominic Légaré
Feuillet #2
LA FONDATION 1908
Le 17 mars 1907 donne lieu à une pétition des propriétaires de la paroisse St-Grégoire-leThaumaturge, demeurant soit en haut du Chemin Papineau, au-delà de la rue Des Carrières, soit à la Côte-de-la-Visitation. L'argument de fond de ces propriétaires était avant tout la distance à parcourir pour pratiquer leur culte. D'ailleurs l'établissement d'un nouveau temple pourrait être bénéfique pour les gens de la région et encouragerait sûrement la venue de nombreuses familles. Cet élément est très justifiable surtout depuis que le Canadian Pacific décida, vers 1900, de construire des usines au nord de la rue Sherbrooke et qu'un syndicat immobilier fit valider et cadastrer une partie de terre à bâtir. Naturellement à ces débuts, il y a peu de familles comparativement aux régions centralisatrices. Dans les familles pionnières, on retrouve les St-Charles, les Marsan, Jette, Legris, Bourassa, Fréchette, Leclerc, Martineau, Tourangeau, Lapierre, Renaud, Petit, Lowett, Turpin, Dussault, Lusignan et les Forcier.
Malgré tout, ce beau projet connaîtra une opposition. les paroissiens de l'Immaculée-Conception, plus précisément du Village de Rossland, font circuler une autre pétition qui s'oppose au démembrement de la paroisse. L'argument est que les paroissiens touchés par les nouvelles limites n'ont pas les moyens de construire une chapelle-école. ils préfèrent dépendre des Jésuites de l'Immaculée-Conception.
Il y avait déjà une liste des catholiques tenant feux et lieux dans la paroisse protégée en haut du chemin de Papineau. Ce qui fait 120 familles, soit environ 500 personnes. Ce dénombrement touche les résidents de la rue Papineau, des Carrières, Marquette, Shaw (Cartier actuel) plus ceux qui attendent l'érection de la chapelle. A ce moment, le plan projeté de la paroisse apparaît comme ceci: au sud, borne par la voie ferrée, à l'est, par la rue de Lorimier, au nord, par la rue Beau bien et à l'ouest par la rue Garnier jusqu'à la voie ferrée De façon plus définie en ce temps-là, l'immense étendue de territoire est limitée par les paroisses Immaculée-Conception au sud, fondée en 1884, Sainte-Philomène de Rosemont, à l'est, fondée en 1905, Sault-au-Récollet (la Visitation) au nord, fondée en 1736, et Villeray,(N.D. du Saint Rosaire), à l'ouest, fondée en 1898.
Ainsi une assemblée est tenue le 23 février 1908
dans le sous-bassement de l'église Immaculée-Conception. On y discute des avantages spirituels de l'érection de la paroisse St-Jean-Berchmans, dont la fête sera célébrée le 13 août et dont les bornes officielles seront: au sud-est, le chemin de fer du C.P., au nord-est, le centre de l'avenue de Lorimier, au sud-ouest la partie qui passe par le centre de la rue Garnier et la partie délimitée par la ligne qui passe entre les numéros quatre et deux et les numéros trois cent trente-et-un et trois cent trente-deux du cadastre, c'est-à-dire au centre de la rue Laurier, et finalement au nord-ouest par les limites de la paroisse du Sault-au-Récollet.
Mais déjà le 25 février 1908, une pétition est adressée à Mgr. Bruchesi, en réponse à l'opposition d'un groupe, manifestée lors de l'assemblée à l'Eglise de l'Immaculée-Conception à propos de la création d'une nouvelle paroisse.
Entre-temps le 16 mars 1908 s'ouvre le boulevard Rosemont, en souvenir de la mère de M. Dandurand, née Rose Philips. Comme toutes les autres rues, des sections de celle-ci connurent d'autres appellations telles: Chemin de la Côte St-Michel, Chemin de la Petite-Côte, Chemin de la Côte-de-laVisitation, Chemin Public, Chemin Principal, 1ère rue, rue Lamothe. Notons que la partie du boulevard Rosemont qui s'étend de la rue St-Denis à la rue de Lanaudière s'appellera rue de Fleurimont jusqu'au 31 décembre 1961.
Et le 13 avril 1908, la rue Shaw qui déjà avait porté les noms de Gain, Bertrand, Simard, se voit décernée le nom de Cartier en mémoire de Sir Georges Etienne Cartier (1814 1873). Cet avocat prit une part active aux troubles de 1837-38). Chef du parti conservateur pendant 24 ans, premier ministre conjoint du Canada avec J.A.MacDonald (1858-1862) il contribua puissamment à l'établissement de la Confédération canadienne.
Pétitions, contre-pétition, et probablement consultations nous conduiront à un décret officiel d'érection d'une nouvelle paroisse en date du vendredi 24 avril 1908. Ainsi la création de la paroisse St-JeanBerchmans fut décidée par Monseigneur Paul Bruchesi. En effet, celui-ci sectionna la partie nord de la paroisse des Jésuites, Saint-Grégoire-le-Thaumaturge, devenue trop populeuse. Ce décret d'érection fut publié au prône de l'Immaculée-Conception les dimanches 26 avril et 3 mai.
Selon un autre décret de Monseigneur Bruchesi en date du Samedi 9 mai 1908, l'abbé Guay est élevé à la fonction de curé et il est désigné et nommé Curé-fondateur de la nouvelle paroisse. D'un grand coeur, et trempé d'une énergie toute apostolique, dès le lendemain de sa nomination comme curé, le dimanche 10 mai, M. Guay vint visiter les lieux d'où devait sortir tant d'espoir.
Pour cette première visite, M. le Curé s'était fait accompagner de son frère, l'abbé F.Hercule Guay, alors vicaire à Longueuil. Une trentaine de personnes s'étaient rendues près des rues Comte (Bellechasse) et Papineau pour y attendre la venue de leur Curé. La première assemblée paroissiale est fixée au lendemain, le lundi 11 mai, à 8 heures. A cette réunion, on décide que le lendemain soir le mardi 12 mai, on commencerait à défricher le terrain (coin Rosemont et Cartier) pour la construction d'une chapelle temporaire pour l'été. Le défrichement devra se continuer les mercredi 13 mai, vendredi 15 mai, et la semaine suivante les lundi 18 mai, mercredi 20 mai et vendredi 22 mai, jusqu'à ce que l'emplacement de la Chapelle provisoire soit complètement nettoyé. M. Napoléon Bourassa offre sa boutique pour dire les messes du dimanche 17 mai à sept heures et à huit heures trente. Le 12 mai 1908, une soixantaine d'hommes s'improvisent bûcherons et abattent les nombreux cèdres et cenelliers. Cette corvée se continuera pendant de longues soirées. La première visite paroissiale aura lieu le lendemain mercredi 13 mai. Les nouveaux paroissiens sont au nombre de 117 familles soient 414 communiants et 185 communiantes c'est-à-dire 599 âmes.
Maintenant décrivons la boutique de Napoléon Bourassa où ont été célébrées les deux Premières messes. Elle avait deux étages et mesurait environ trente pieds de façade par seize de profondeur. Dans cette boutique, M.Bourassa y avait aménagé un bureau d'agent d'immeubles, de la maison Ross, propriétaire de lots à vendre en plein centre de la paroisse. Mais elle était avant tout une manufacture de portes, châssis et meubles. Cette boutique était située à l'angle des rues Chabot et Rosemont aujourd'hui (1978) occupée par un magasin de bicyclettes. Cette boutique pourra recevoir environ 50 personnes. La messe y aura lieu pendant 2 ou 3 semaines. Les gens qui ne pourront y trouver place auront la possibilité d'entendre la messe à l'extérieur car portes et fenêtres demeureront ouvertes.
Premier lieu
Le 16 mai, un groupe de gens se réunit pour terminer les derniers préparatifs de la messe du lendemain. Ainsi les demoiselles St-Charles aidées de plusieurs autres, travaillent à la décoration avec des drapeaux et banderoles de toutes sortes. M. Oscar Loriot installe au-dessus de l'endroit où la messe doit être dite une belle grande inscription: "St-Jean Berchmans, priez pour nous." La table pour déposer les ornements est fournie par Madame Yves St-Charles, dont le fils aura l'honneur de servir la messe à titre de premier enfant de choeur. La table pour recevoir les burettes est offertes par la famille J.-C.Legris. Une petite cloche est fournie par M. Joseph Beaudoin, et est installée à la porte pour y sonner la messe. Le curé, de son côté, prépare son autel. Il place la pierre d'autel sur l'établi de la boutique avec un petit tabernacle façonné durant la semaine, par M. Bourassa. Le curé y installe le crucifix pour dominer le sacrifice à l'autel, couvre l'autel des trois nappes liturgiques.
Tel que prévu, le dimanche 17 mai est célébrée la première messe de la paroisse St-Jean-Berchmans. Une messe est célébrée dès 7 heures et l'autre à 8 hres 30. Le Curé souhaite la bienvenue à tous les fidèles qui avaient apporté, chacun et chacune une chaise pour s'asseoir. Puis vint la lecture du décret d'érection canonique de la paroisse avec les limites et la nomination du curé. Soulignons qu'un musicien cornettiste soutenait les voix des assistants de son instrument. Au prône monsieur le curé compara la pauvreté de la chapelle à l'atelier de Saint-Joseph. Au dire des anciens, ces trois premiers dimanches dans la boutique Bourassa sont inoubliables tant par leur simplicité que par leur chaleur. Mais, aussi par un élément original: le curé disait la messe "à l'envers" tourné vers le grand autel, dos à la nef.
C'est le dimanche 24 mai 1908 que fut faite la première publication de mariage. Les futurs époux étaient Alfred Ménard de la paroisse Saint-Pierre et Albertine Saint-Charles de la paroisse St-JeanBerchmans, bien sûr. Cependant aucune chapelle permanente n'était prévue avant l'automne suivant. Le curé répéta son invitation: "Mardi soir, le 26, 11 y aura du bois et des clous. Venez tous les soirs sauf le jeudi annonçait le curé: "Dimanche prochain, le 31 mal, 11 nous faudra être rendus dans notre nouvelle chapelle". C'est aussi le 26 mai, que le curé reçut l'autorisation de former un corps régulier de fabrique. Le curé devait faire élire huit marguilliers qui éliraient à leur tour et parmi eux les trois marguilliers du banc. Les heureux élus furent messieurs Louis Turpin, Joseph Blanchard et Joseph Régimbald. Enfin le 29 mai 1908, la paroisse StJean-Berchmans fut érigée civilement.
Avant la construction du presbytère, le curé Guay demeurait sur la rue Marquette, au coin de De Fleurimont, au deuxième étage, de la maison de monsieur Marsan. La construction de la chapelle-école s'effectua sur la rue Cartier. Les travaux du presbytère débuteront immédiatement et le presbytère sera installé tout à côté de la chapelle-école d'un étage. En 1910 un 2e étage sera ajouté à l'édifice réservé exclusivement à l'église. Quelques années plus tard on procédera à la construction de l'école St-Jean-Berchmans.
On construisait donc une chapelle temporaire sur le boulevard Rosemont en 1908, en raison de l'exiguïté de la boutique de Napoléon Bourassa. La paroisse dénombrait alors 117 familles, 599 âmes, le besoin d'un nouveau temple était urgent. Tout compte fait, le 14 juin 1908, on annonce une assemblée dans la chapelle temporaire pour exposer la situation; soit l'absence de chapelle convenable pour l'hiver ainsi que l'absence d'école adéquate. Le curé mentionnera le peu d'espace pour se loger dans la chapelle. Il sera décidé de demander un emprunt de $6000.00 pour les constructions necessaires. Le 5 juillet 1908 l'archevêque vend à la paroisse le terrain acheté pour y construire le quadrilatère actuel.
Le 25 octobre 1908, lors d'une assemblée au presbytère, il fut résolu à l'unanimité que l'Oeuvre et la Fabrique de la paroisse accepteraient de la Corporation Archiépiscopale Catholique Romaine de Montréal les quarante terrains acquis de M. Molson. Il y eut aussi une proposition d'achat d'une cloche de 375 livres au prix de $90.00. A partir de cette date, on demande deux cents par place de banc à la première messe du dimanche et cinq cents à celle de dix heures. Et la cloche fut bénie le 15 novembre 1908. Lors du premier rapport paroissial envoyé à l'Archevêché par le curé Guay, celui-ci ne manque pas de souligner que son revenu pour l'année écoulée se solde à ...zéro! Par contre, on dénombre cent vingt-trois familles canadiennes-françaises à l'intérieur des limites de la paroisse alors qu'il n'y en a seulement que six anglaises. On remarquera aussi la présence de 47 familles juives, surtout rue Papineau et rue Marquette.